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ÉQUIPES DE FRANCE JEUNES

"Je me suis dit que ça allait être un chemin de croix"

Presse Sports
Julien Guérineau - 09/07/2020
Privée de son leader Tony Parker parti en NBA, la génération 82-83 revient de Lituanie avec une médaille de bronze à l’Euro U20 2002, après avoir frôlé l’explosion en plein vol.

En 2001, deux ans après son arrivée à la tête du Pôle France, à l’INSEP, Richard Billant, ancien entraîneur en Pro B au Havre, reçoit un sacré cadeau. Entraîner l’Equipe de France U20. Celle de la génération 82-83, championne d’Europe U18 un an plus tôt à Zadar. Tony Parker, Boris Diaw, Mickaël Pietrus, Ronny Turiaf. Du luxe. Grand luxe. Une équipe qui doit malgré tout en passer par des qualifications en Hongrie pour assurer sa place à l’Euro 2002 en Lituanie. "J’arrivais en Equipe de France. 20 ans et moins quand même !", sourit l’actuel sélectionneur du 3x3. "Je me suis dit : ça va être super. On arrive à Székesfehérvár, à une heure de route de Budapest, début juillet. Une chaleur pas possible. Ils nous mettent dans un lycée. Des dortoirs. Par six. Pas de rideaux aux fenêtres. Des moustiques. La bouffe innommable. La totale." Sans Pietrus, la France remporte malgré tout ses cinq rencontres. Parker régale sur le terrain (25,8 pts, 6,8 pds) et en dehors, commandant des pizzas pour améliorer l’ordinaire de ses troupes.

Mais 12 mois plus tard, au coup d’envoi de la préparation, le leader maximo a disparu. Après une saison de rookie prometteuse, les Spurs ne tiennent pas à voir leur nouveau meneur titulaire arpenter les parquets des compétitions de jeunes. "L’année d’avant, dans des conditions de merde, tout s’était bien passé. Avec Parker tout le monde filait droit", remarque Richard Billant qui tombe, à Vittel dans un véritable panier de crabes. Les adolescents d’hier sont devenus des hommes. Qui se jaugent, se défient. "Ceux qui étaient partis aux Etats-Unis voulaient faire voir aux autres qu’ils étaient les meilleurs. Pareil pour ceux qui étaient déjà en pro. J’ai voulu faire venir Ilian Evtimov. Mais il ne faisait pas partie de l’équipe avant. Les autres le faisaient chier. Mais il n’a jamais bronché. C’est un mec génial." L’unité des junior en or est loin, l’ambiance clairement tendue et certains sont proches de faire leurs valises pendant la préparation. Mais le talent est bien présent et après un tournoi à Paris, à la Halle Carpentier, la France semble avoir trouvé sa vitesse de croisière.

A son arrivée à Alytus où elle loge dans un sanatorium en pleine forêt, elle sombre pourtant lors du match d’ouverture face à l’Espagne : 53-89. "Une branlée monumentale", souffle Richard Billant. "Une Bérézina." Les Bleuets alternent ensuite le chaud et le froid pour arracher la quatrième place de leur poule et un passage en quart de finale contre la Slovénie du trio magique Sasha Vujacic-Beno Udrih-Erazem Lorbek. Dos au mur, ils sortent le grand jeu dans le sillage d’un Mickaël Pietrus étincelant (23 points, 13 rebonds). Un feu de paille. Le lendemain, contre la Grèce, la défense tricolore, habituel point fort, passe au travers. Les Grecs se reposent avant tout sur leur duo d’arrières Vassilis Spanoulis-Nikos Zisis. "Il faudrait que je revoie le match. Peut-être l’analyserais-je différemment aujourd’hui mais dans mes souvenirs il y a eu de nombreuses mésententes", estime Richard Billant. "Ils avaient un système dérivé de flex et j’avais demandé des changements systématiques." Consigne tombée aux oubliettes. Spanoulis et Zisis se fendent de 50 points et 8 passes décisives en route vers le titre.

Les Français auront cependant le bon goût de conclure la compétition sur une remarquable prestation contre la Russie pour le bronze. "C’était un vrai pétard cette équipe", en rigole Richard Billant. "Ça aurait pu être un fiasco total. Je me rappelle qu’il y avait un petit lac à côté de l’hôtel à Vilnius. Avec Philippe Ory et Alain Garos on a plongé dedans à minuit, après la médaille. On était tellement soulagé de ne pas revenir bredouilles." 2002 marque incontestablement un tournant. Dans cette équipe, quatre joueurs (Diawara, Turiaf, Pietrus, Diaw) évolueront en NBA. Les staffs découvrent alors l’omniprésence des scouts, la valse des agents autour des familles et le difficile équilibre entre ambitions personnelles et collectives. Le début d’une nouvelle ère.