Après deux ans avec « 3x3 Paris » tu as fait le choix de revenir au 5x5 en t’engageant avec le Stade Toulousain. Comment s’est passé ta signature ?
Tout s’est déroulé très rapidement. Nous étions en Chine pour le Challenger de Kaohsiung, dans le même temps Toulouse jouait la deuxième journée de NM1. Ils perdent le match et décident de remanier un peu leur effectif. À ce moment-là mon agent me prévient, j’ai le coach de Toulouse au téléphone dans la foulée et en trois jours c’était une affaire réglée.
Qu’est ce qui t’as poussé à retourner au 5x5 ?
J’avais fait part au groupe dans l’été que si j’avais une opportunité de 5x5 j’allais surement la saisir. J’avais envie de retrouver un projet dans le sud-ouest et retrouver une certaine stabilité car je vais devenir papa au mois de novembre. L’enchaînement et le rythme d’une saison de 3x3 ne collait plus forcément mes projets personnels. La proposition de Toulouse est intervenue au bon moment, sur le plan sportif comme familial. Cela me permet également de remettre un pied au 5x5 dans un club que je connais.
Ce retour vers le basket traditionnel c’est un adieu au monde du 3x3 ?
Je ne me voyais pas jouer pour une équipe étrangère sur le World Tour. L’objectif était de favoriser des projets français et pour l’instant je n’avais pas assez de garanties sur ce qui allait se mettre en place. J’avais fait ce pari là il y a deux ans en m’engageant avec « 3x3 Paris », repartir de zéro sur un autre projet aurait été compliqué pour moi. Après je pense qu’il ne faut se mettre de barrière, si des opportunités se présentent l’été je les saisirai et bien sûr si Karim (Souchu) souhait m’appeler en Équipe de France je répondrai présent.
Tu étais triste de quitter le groupe ?
Sur le moment je n’étais pas forcément triste, j’étais très excité à l’idée de rejoindre un nouveau projet au Stade Toulousain. Sur l’instant je pense que tu ne réalises pas forcément car l’enchaînement entre les deux s’est fait tellement rapidement que je n’ai pas trop eu le temps d’y penser. J’étais plus triste lorsque Vincent (Fauché) est parti, le fait de perdre un coéquipier avec qui on a vécu pleins de trucs, qu’il ne fasse plus parti du groupe c’était difficile. C’est vrai que l’aventure était énorme, j’ai écrit à Karim (Souchu) par la suite et il y avait beaucoup d’émotions à ce moment-là.
Comment a réagi le groupe lorsque tu leur as annoncé ?
Tout le monde a été très compréhensif, je leur avais déjà évoqué le fait que j’allais devenir papa et que j’étais ouvert à une opportunité de retour au 5x5. C’est vrai que ça tombe sur une période où les mecs enchainent pas mal, pour l’avoir vécu l’année dernière l’enchaînement à quatre joueurs n’est pas évident. J’ai forcément une grosse pensée pour eux mais ils ont vraiment été cool. Karim aussi était content pour moi.
Tu as disputé plus de 35 tournois avec Paris dans 17 pays différents, qu’est-ce que tu retiens de cette aventure ?
Je retiens tous les déplacements qu’on a pu faire autour du monde. Avec les joueurs et le staff on a passé des heures et des heures à travailler, se remettre en question, améliorer certaines choses pour se faire une place au meilleur niveau mondial. Je pense que le choix des joueurs a été très bien pensé, au niveau humain on a eu des moments vraiment durs mais le groupe ne s’est jamais désunis. On est resté soudé pour avancer et rebondir, on est allé chercher des Challenger et des Masters. C’est une fierté d’avoir maintenu cette cohésion du début à la fin lorsqu’on sait comment fonctionne le 3x3. Avec les enchaînements de tournois tu as très peu de jours chez toi pour décompresser, tu passes toute la semaine avec l’équipe et si le groupe ne vit pas bien ça devient très compliqué.
Est-ce que tu t’attendais à ça lorsque tu t’es lancé dans l’aventure ?
Absolument pas. Je ne m’attendais pas du tout à ça. Peut-être qu’au début c’était de la naïveté de ma part mais j’étais encore novice dans la discipline au commencement, j’avais fait des regroupements internationaux et quelques étapes du circuit national « Superleague 3x3 FFBB » mais j’étais très loin de me dire que j’allais passer des mois à traverser le monde et jouer tout ces tournois.
Quel est le truc le plus fou que vous ayez vécu pendant ces deux ans ?
Il y en a tellement. Lorsque tu arrives au 3x3 on te dit directement que cela implique beaucoup d’autonomie et d’adaptation. Cela peut se traduire par des galères avec la météo, des navettes qui ne t’amènent pas au bon endroit, parfois tu arrives tu te rends compte que le terrain n’est pas droit. Lors du premier tournoi à Lipik en Croatie, on ne passe pas les poules. C’était catastrophique, c’était une des premières étapes du circuit international qu’on faisait, on est arrivé au milieu de nulle part, on dort dans une sorte d’hôpital. Là je me dis « mais où on est ». Je me rappelle on arrive à l’aéroport donc on doit rejoindre le site en minibus et l’organisateur nous appelle pour nous dire de récupérer les maillots du tournoi sur la route. Il y a eu Neom aussi, on arrive dans le désert en Arabie Saoudite où on trouve une énorme structure de 3x3 mise en place pour l’occasion. Le spot était exceptionnel ! Et puis forcément Bordeaux où nous avons remporté la première victoire sur une étape du circuit international pour une équipe française. En plus à domicile et je n’avais pas été trop mauvais sur ce tournoi là (rires).
Est-ce que tu as ressenti la montée en puissance de cette équipe ?
Oui complétement. Lorsqu’on reprend la prépa en janvier/février, l’avance qu’on avait sur l’année précédente était conséquente. On a développé un collectif qui nous est propre, il faut savoir que nous sommes une équipe qui performe beaucoup sur nos systèmes de jeu au-delà de nos individualités.
Tu as eu la chance de remporter un Challenger et un Open de France avec Paris mais pas de Masters, le plus haut niveau de tournoi mondial. Il y a-t-il une forme de frustration pour toi ?
Pas forcément. Il faut dire que j’ai eu ma chance sur les Masters (rires). J’en ai fait 5 l’année dernière où on a échoué de peu. Lorsque l’équipe remporte son premier Masters à Wuxi, Jules me casse le nez quelques jours plus tôt donc je ne prends pas l’avion. On a eu de la chance que Paul, qui revenait de blessure, soit apte à jouer à ce moment-là.
À quel point c’est dur de gagner un Masters ou un Challenger du « FIBA 3x3 World Tour » ?
Challenger ou Masters c’est difficile de prédire quelle équipe va l’emporter. Avoir une certitude dans le 3x3 ça n’existe pas, le format est fait pour que ça se joue sur des détails. Souvent les équipes engagées sur les Masters sont plus préparées. C’est une échéance majeure dans le calendrier international et la marge d’erreur est faible, donc tu te prépares pour ça.
Tu penses que cela va être difficile de revenir à un rythme de club en 5x5 ?
Le rythme d’entrainements pas trop. Il va surtout falloir que je me remette dans le bain car il y a du monde sur le terrain (rires). Je vais devoir retrouver les principes de jeu notamment défensivement avec les aides et les mouvements collectifs. Il faut se remettre aussi dans les courses, les contres attaques, c’est quelque chose que je n’ai pas fait depuis deux ans. Après ça reste le même sport, il faut marquer des paniers mais ça je pense que ça ira.
Tu t’es fixé des objectifs pour ton retour dans le basket traditionnel ?
L’objectif c’est de reprendre du rythme, retrouver des sensations sur le terrain et m’adapter à mes coéquipiers le plus rapidement possible pour atteindre les objectifs du club.
Il y a une forme de pression supplémentaire de revenir deux ans après avoir quitté la discipline ?
Je n’ai pas forcément de pression, je suis plutôt excité à vrai dire. J’ai envie de performer pour le club car ils me font confiance. Certains clubs n’auraient peut-être pas fait ce pari.
Tu as porté le maillot Bleu à 6 reprises lors des Jeux Européens et dans le cadre des qualifications à la Coupe d’Europe notamment. Cela reste un objectif pour toi ?
Oui. Je ne vois pas pourquoi j’enlèverai cet objectif. C’est vrai qu’il y a beaucoup de concurrence mais j’ai maintenant une belle expérience sur le World Tour et dans les compétitions internationales. Je pense que je reste légitime autant en termes d’expérience que de niveau de jeu. Le coach fera ce qu’il voudra, il sait que je suis là et que je suis prêt à m’engager à 100% pour l’équipe de France.
À ton avis, reverra-t-on une équipe française aussi active sur le World Tour que Paris ?
Je ne sais pas mais je le souhaite. Ce serait vraiment dommage de pas avoir de continuité pour la discipline au plus haut niveau international pour l’instant. J’espère que ceux qui ont envie de faire ce pari de se consacrer pleinement à la discipline vont trouver les moyens nécessaires parce que mine de rien il y a Los Angeles à préparer et ça arrive vite. Les autres équipes se préparent aussi, il y a des jeunes joueurs talentueux au sein des autres nations aussi. Si tu ne joues pas tu ne performes pas, il faut des spécialistes et les spécialistes il faut qu’ils jouent.
Un dernier mot pour la route ?
Je voudrais remercier la Fédération Française de BasketBall (FFBB) et l’ensemble des acteurs du basket français qui nous ont permis de vivre cette aventure. Pour ceux qui ne connaissait pas le 3x3 ça paraissait assez fou mais avec le travail qui a été fait je pense qu’il y a beaucoup de personnes qui ont commencé à comprendre pourquoi on a fait ça. Je voudrais remercier tout le monde, que ce soit le président Jean-Pierre Siutat, Alain Contensoux qui a aussi beaucoup pour l’essor de cette discipline. Laurent Hernu aussi, notre préparateur physique, je sais que c’était aussi difficile pour lui de s’adapter à un projet comme ça. Anthony Christophe qui a été très important pour le projet de Paris, on n’en parle pas beaucoup mais ses interventions ont été très précieuses. Je remercie aussi du fond du cœur l’ensemble des joueurs présents, mais aussi Sylvain Sautier, Léopold Cavalière. Sans ce groupe là on ne sait pas ce que cela aurait donné. Même si on a manqué quelques échéances on peut être fier de l’aventure qu’on a faite et des résultats. C’est une énorme fierté et on ne l’oubliera jamais.