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A la découverte de Max Joseph-Noël

04/04/2013
Journaliste spécialisé dans le basket depuis 30 ans, fondateur de Maxi-Basket et de divers magazines de sport, auteur du blog ilovebasket.com, Pascal Legendre nous propose ici une interview de Max Joseph-Noël, le premier Antillais à avoir porté le maillot de l’'Equipe de France (7 sélections en 1964 et 1965).

Max Joseph-Noël : « J’avais honte que ma femme gagne plus d’argent que moi »

Il fut le premier international venu des Antilles. Max Joseph-Noël, 73 ans aujourd’hui, fut une météorite dans le ciel du basket français. Son parcours atypique est vraiment étonnant.
« Les journalistes sont toujours en train d’exagérer ! Je mesure 1,92 m. On m’a signalé à 1,94 m et même parfois 1,96 m. J’ai par contre une envergure de 2,05 m et je sautais un peu plus haut que les autres mais surtout avec les bras, j’allais piquer des balles ou les contrer. C’était ma spécialité comme Serge Ibaka ! Je jouais pivot, j’étais l’un des plus petits du championnat. Je faisais 80 kg à mon arrivée en métropole et après une année j’ai pris 7-8 kg sans faire de muscu. Robert Busnel, qui était le patron de l’équipe de France, disait « faire de la musculation, ça enlève de l’adresse ! » Alors que l’on voyait aux actualités les pros américains, et même les universitaires, qui étaient solides. Il est allé aux Etats-Unis, il a fait venir Bob Cousy (NDLR : meneur de jeu emblématique des Boston Celtics des années 50-60, d’origine française), il a été ébloui, et il fallait tout faire comme les Américains. Comme quoi…

René Lavergne disait de moi que je n’étais pas bon car j’étais un produit de Monoprix ? Pourquoi ? Joe Jaunay était l’entraîneur de Caraman, à 25 km de Toulouse qu’il a fait monter en 1ère division. Je le rencontre à Printafix, un concurrent de Monoprix, en plein centre de Toulouse.

- Monsieur, vous me reconnaissez, je suis Joe Jaunay, le meilleur entraineur de basket de la région.

- Non monsieur !

- Êtes-vous intéressé pour jouer au basket ?

Je lui ai donné mon adresse et il m’a dit qu’il m’écrirait. J’étais sportif mais je n’avais pas fait de sport de haute compétition dans ma jeunesse car à 11 ans j’ai eu le genou gauche pété suite à un accident et on m’avait interdit de faire du sport. J’en ai fait en cachette à Fort-de-France, un peu de foot, un peu de basket. Je suis arrivé en France à 17 ans pour faire ma terminale. Après avoir vu Jaunay, et sans nouvelles de sa part, je suis allé au TUC, le club universitaire, mais on ne s’est pas occupé de moi. Le hasard a voulu que je le rencontre une deuxième fois, l’été suivant, toujours à Printafix. Il avait perdu mon adresse et il m’a demandé si ça m’intéressait toujours, je lui ai répondu que oui.

Tout le mois de juillet il m’a entrainé tout seul, trois heures le matin, trois heures l’après-midi. J’ai débuté de zéro mais j’étais un athlète. En deux mois il m’a appris à récupérer et à remettre dedans. J’avais interdiction de dribbler en match. Dès septembre je me rendais trois fois par semaine à Caraman pour les entrainements. C’était la seule équipe de 1ère division avec un terrain macadamisé en plein air. Il y avait 2.000 habitants dans le village, c’était vraiment le basket à la campagne. J’ai débuté en 1ère division en octobre contre le Racing Club de France qui était champion de France !

Je n’ai joué qu’une année à Caraman. Jaunay est tombé malade, il y a eu un clash avec les dirigeants, le club est descendu en 2e division. Louis Bertorelle, notre vedette, est parti au RCM Toulouse avec Boyer qui faisait 1,96 m. J’ai suivi Jaunay à Castres en Régionale 1. J’ai continué à me former et c’est là que j’ai rencontré ma femme. J’ai rejoint le RCMT, de 1960 à 65. Il y avait Bertorelle et en meneur de jeu mon meilleur ami, Jean Luent (NDLR : futur entraineur d’Orthez et de l’équipe de France).

En 64, à la demande de l’entraîneur André Buffière, j’accepte de faire des stages au Bataillon de Joinville et je suis retenu en équipe de France militaires. Il y avait Alain Gilles, Daniel Ledent, Jacky Renaud, on est champion du Monde à Damas !

J’ai fait ensuite 12 ou 13 matches en équipe de France mais il n’y en a que 7 qui ont compté (NDLR : d’avril 64 à janvier 65). Et là, j’ai dit « terminé ! » J’ai arrêté ma carrière à 27 ans. J’étais en plein boom, mais on était des amateurs chef ! J’étais chargé de famille et j’avais honte que ma femme gagne plus d’argent que moi. J’ai passé mon concours en octobre 1965 et je suis devenu directeur d’hôpital public. J’ai eu des propositions de La Vendéenne de La Roche/Yon et du Stade Clermontois en N2. Refus. Je travaillais 60h par semaine. J’ai été en poste à Dreux et j’ai quand même été entraineur-joueur à l’Alliance, en Régionale.

J’ai suivi l’Euro cet été et j’étais présent à Toulouse pour le France-Canada. Je préfère le basket féminin car les filles jouent plus en équipe. Ah ! si… Jordan, Magic, Bird, Pippen, la Dream Team de Barcelone, ça c’était du basket collectif ! »

Propos recueillis par Pascal LEGENDRE